Un métier riche en émotions


30 décembre 2016
Un métier riche en émotions

Bien sûr, j’éprouve des émotions. Je ne rentre jamais intact de mes voyages. Oui, mon métier au sens strict consiste à visiter des champs de thé, à parler avec des producteurs, à participer à des dégustations, à comprendre comment on fait le thé. Mais, dans la pratique, mon métier ne s’arrête pas là.  Dans la pratique, il ne s’agit pas simplement de feuilles de thé, d’arbustes, de machines, de saveurs. Avant tout, le thé, ce sont des gens. Ce sont des hommes et des femmes. Ce sont des sourires, des étonnements, des joies, des peines, des rires, des peurs, des curiosités, des inquiétudes, des amusements, des désirs, des défis, des souffrances, des fiertés, des surprises, des espoirs, des rêves… Les hommes et les femmes que je rencontre, là-haut, dans la montagne, me livrent tout cela. Alors, le moindre paysage que je revois, m’émeut. Je repense au moment. Je me souviens des gens. Je me souviens de ce que j’ai compris de la vie en ces lieux. Je me souviens de mes émotions. Je voyage sans cuirasse. Un voyage est comme un naufrage et ceux dont le bateau n’a pas coulé ne connaîtront jamais la mer, écrit Nicolas Bouvier, un auteur que j’affectionne. Alors il m’arrive de couler. De ne pas revenir comme j’étais parti, de n’être plus tout à fait le même au retour. Ou de ne plus vouloir revenir. De me perdre. La vie des gens me touche. Les émotions des autres me touchent. J’ai cette chance incroyable de rencontrer des gens différents de moi, différents à tout point de vue, d’un point de vue culturel, religieux, linguistique, ethnique. Différents, mais semblables en ce que nous sommes humains. Et, souvent, lorsque je redescends d’une montagne après y avoir passé plusieurs jours, j’ai besoin de me poser. De faire une halte avant de rejoindre la vallée, j’ai besoin de m’asseoir au bord de la route, au bord d’un champ, d’une rizière, avant de retrouver la ville, avant d’oublier, oublier pourquoi je quitte cet endroit que j’aimais déjà. Lorsque je redescends de mes montagnes, j’ai besoin de faire une pause, besoin de souffler, besoin que ça n’aille pas trop vite, besoin de rêver, besoin de pleurer, parfois, besoin d’avoir la conscience de ce que je quitte, de ne pas me presser, besoin simplement de respirer, d’emplir une dernière fois mes poumons d’air bleu, de vivre.

Vous avez aimé cet article ?
Commentez
Un commentaire sur “Un métier riche en émotions
Répondre à Katkoff Monique Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Partagez

Articles similaires

Le travail manuel reste essentiel pour le thé

12 septembre 2014

  Dans la plupart des pays producteurs, les meilleurs thés sont récoltés à la main. La culture du thé de qualité nécessite donc souvent la participation d’un très grand nombre…

Tweeter cet article sur Facebook. Tweetez cet article.

Cueillette du thé pour les hommes au Népal

28 mai 2010

Dans certaines régions du monde, la cueillette du thé est uniquement réservée aux femmes alors que les hommes sont affectés à d’autres tâches. C’est notamment le cas en Inde et…

Tweeter cet article sur Facebook. Tweetez cet article.

« Delmas Bari » : une plantation qui porte mon nom

15 juillet 2011

Un jour, en me rendant à Darjeeling, j’ai eu la surprise de découvrir qu’une parcelle de la plantation de North Tukvar portait mon nom. Il s’agissait d’une toute nouvelle parcelle…

Tweeter cet article sur Facebook. Tweetez cet article.