Avant de me lancer dans le thé, j’ai longtemps rêvé de devenir journaliste. J’aimais l’idée de m’intéresser aux gens, de leur poser des questions, de comprendre ce qu’ils faisaient, de me faire expliquer des choses parfois compliquées et d’essayer de les rendre compréhensibles. J’aimais l’idée d’investiguer, de recouper l’information, de mettre à l’aise mon interlocuteur pour instaurer un dialogue de qualité. J’avais envie d’un métier qui m’emmène au bout du monde, qui me fasse rencontrer des gens de tous les horizons, de toutes cultures, des hommes et des femmes qui ne parlent pas ma langue, qui ne partagent pas mon histoire. J’avais envie de recevoir leur message et de le transmettre. Et puis, finalement, je me suis créé ce métier de chercheur de thé qui n’existait pas. J’aurais pu me contenter de rester derrière le comptoir de ma boutique de thé, j’aimais ça, accueillir les clients, les écouter, les orienter, mais j’ai eu envie d’aller plus loin, de mener mon enquête, de savoir d’où venaient ces feuilles de thé. J’ai appris d’abord à déguster, à reconnaître les goûts, les arômes, j’ai appris ensuite des langues étrangères. J’avais soif de découvertes, d’aller au-devant d’un monde ignoré, celui de la culture du thé. J’ai fait mon balluchon. J’ai été à la rencontre des fermiers, des cultivateurs, des négociants, des cueilleurs, des planteurs. Je me suis pris au jeu. Voyage après voyage. J’ai pris mon temps. Je suis parti à la rencontre de ces hommes et de ces femmes qui peuplent ces montagnes sur lesquelles ils pratiquent la culture du thé. Je les ai trouvés dans les champs, sur la place d’un village, devant l’usine. Je me suis assis. Je suis resté. J’ai écouté. Ecouté. Ecouté. J’ai tout enregistré. Et voilà comment, trente-deux ans plus tard, ce métier me comble et que ce qui me plaisait tant, autrefois, dans ce métier de journaliste, je le retrouve ici dans celui de chercheur de thé.
Les routes du thé
Durant des siècles, le thé a voyagé à dos d’âne, à dos de cheval, à dos de yak. Il existait plusieurs routes du thé. Ces routes partaient des provinces chinoises productrices de thés compressés (Yunnan, Sichuan…) pour rejoindre le Tibet. A cette époque, le thé s’échangeait contre du sel ou bien contre des chevaux.
Pour perpétuer la tradition, certains, de nos jours, organisent des reconstitutions et l’on peut alors voir défiler des bêtes par centaines qui portent sur leurs flancs des galettes de thé.
Du bon sens
Un fermier qui fait pousser du thé peut avoir à lutter contre différents comportements : celui de certains insectes (araignées, moustiques…) qui endommagent les feuilles, la gourmandise des chenilles qui apprécient le goût des jeunes plants, la prolifération des champignons le long du tronc de l’arbuste. Mais des solutions existent sans qu’il soit nécessaire d’avoir recours à des produits phytosanitaires. Favoriser la présence d’oiseaux et autres prédateurs en conservant des haies boisées à proximité des théiers, par exemple. Autre facteur important : l’altitude. En effet, les nuisances se réduisent à peu de chose lorsque le temps est plus froid. Il faut donc là aussi respecter la nature et planter les théiers dans un environnement propice. De même que l’on ne construit pas une maison dans un marais, on évite de créer une plantation de thé en milieu trop humide, à basse altitude, sur un terrain plat et non drainé, cultivé de façon intensive et après avoir tout déraciné alentour. Faute de quoi il ne risque pas d’être bio. Simplement du bon sens.
À Kumamoto, le jardin Suizen-ji
Lorsque je suis au Japon, à la moindre occasion je visite des jardins. Ce sont des lieux d’une beauté incroyable. Des lieux de paix, des lieux de silence dans lesquels d’invisibles jardiniers habités par un sens aigu de la perfection taillent aux ciseaux la plus petite pousse. Ils sculptent le vivant de façon à donner au tout le spectacle d’un paysage grandeur nature. D’un simple monticule on symbolise le Mont-Fuji.
J’y viens souvent avec un livre et j’alterne entre lecture et contemplation. Un peu l’idée que je me fais du paradis.
Je vous souhaite une vraie année !
Lorsque l’on sait que les algorithmes des réseaux sociaux sont programmés pour vous mettre en contact avec des gens qui pensent comme vous afin de vous faire croire que tout le monde pense comme vous, et à l’aube de cette nouvelle année, je formule le vœu de passer moins de temps sur les réseaux sociaux, smartphones et autres tablettes, tout simplement parce que la vraie vie ne s’y trouve pas. Je vous souhaite de passer davantage de temps à faire de vraies rencontres, avec de vrais gens. Pour votre plus grand bonheur. Je vous souhaite une vraie année !
Derrière les thés que vous aimez il y a des visages
Lorsque l’on se prépare un thé, on peut avoir envie d’en savoir davantage sur le breuvage en question, par exemple découvrir le paysage qui l’a vu naître, ou bien faire connaissance avec celles ou ceux qui ont participé à sa manufacture. Tant mieux si mon blog peut vous offrir cette possibilité ! Pour les amateurs du thé du nord de la Thaïlande (Milky oolong, par exemple), voici les visages de cueilleuses de Mae Salong en pleine récolte des feuilles.
Madame Ming, une femme exceptionnelle
Dans le monde du thé, Madame Ming fait figure d’exception. Rares sont les femmes à la tête d’une exploitation de thé. Et non seulement Madame Ming produit des oolongs remarquables, mais encore est-elle une pionnière puisqu’à l’origine de l’introduction du thé autour de Mae Salong. Depuis, manufacturer des thés peu oxydés à la façon de Taiwan est devenu une mode dans cette partie du Triangle d’Or située aux confins de la Thaïlande et du Myanmar (Birmanie).
J’ai rencontré Madame Ming il y a près de dix ans grâce à Augustin, l’un de mes neveux qui parcourait à moto ces montagnes reculées et auquel j’avais demandé, sitôt qu’il rencontrerait des théiers, de me prévenir.
Madame Ming me réserve ses meilleurs thés – Jade Oolong, Ruby Oolong, Milky Oolong et autres Thai Beauty, ainsi que ce genre d’amitié qui dure une vie.
Audacieuse et exigeante, Madame Ming ne se repose pas sur ses lauriers, elle expérimente, innove, s’essaye avec succès aux thés noirs et sombres. J’ai d’ores et déjà sélectionné certains d’entre eux que vous pourrez bientôt découvrir.
Des paysages variés
Le thé pousse dans de nombreux pays mais d’une région à l’autre les plantations ne se ressemblent pas. A la douce ondulation des lignes de théiers, au choix des arbres qui leur apporte une protection légère, aux pierres sombrent qui parsèment le domaine, on reconnaît ici le sud de l’Inde. Munnar (Kerala), Coonoor (Tamil Nadu) produisent des thés de qualités diverses. C’est autour de la ville de Ooty (Tamil Nadu) que l’on trouvera les meilleurs crus.
Le brie fond de plaisir pour le Bancha Hojicha
Thés et fromages font bon ménage. Avec un brie, qu’il soit de Melun, de Meaux, de Nangis ou de Montereau, je recommande un Bancha Hojicha. Les notes boisées et torréfiées de ce fameux thé grillé japonais s’accorderont à ravir avec les arômes de cette pâte molle à croûte fleurie. A condition toutefois de préférer à l’infusion dans l’eau chaude, une infusion d’une heure à température ambiante.
Trouver le bon accord n’est pas une mince affaire, il faut déguster beaucoup de thés différents, comme ici ou je compare Pu erh Impérial, Malawi Dark et Bancha Hojicha face à trois bries, après bien d’autres essais.
Sous le toit du monde
Le thé se cultive à Darjeeling jusqu’à fin novembre, à une ou deux semaines près, selon la température des sols. En effet, sitôt que l’on descend sous les 16 degrés, le théier entre en dormance jusqu’au printemps suivant. Novembre, un mois idéal pour admirer le troisième sommet du monde, le Kanchenjunga, qui domine les contreforts himalayens.